Pour garantir l’efficacité de la règlementation européenne sur les substances chimiques dangereuses

VOEU co-présenté par les groupes Ecologie et Solidarité et Communiste et Républicain lors de la session plénière du 12 mai 2022.

VOEU adopté


La France doit s’inscrire clairement dans la lutte contre la propagation des substances chimiques connues pour leur particulière dangerosité sur la santé comme sur l’environnement. Il faut reconnaître les études scientifiques indépendantes, menées suivant des protocoles rigoureux, susceptibles d’alerter bien en amont. Il faut agir contre leur fabrication, leur importation et leur commercialisation en Europe.

L’Union européenne fabrique chaque année plus de 300 millions de tonnes de produits chimiques. Depuis 2007 en revanche, le règlement européen sur les substances chimiques REACh (pour Regulation on registration, evaluation, authorisation and restriction of chemicals) impose de recenser, d’évaluer et de contrôler ces substances fabriquées, importées et mises sur le marché européen. Les industriels doivent systématiquement enregistrer leurs substances auprès de l’ECHA (Agence européenne des produits chimiques).

S’il s’agissait au départ d’une réglementation ambitieuse, elle s’est révélée limitée au fil des ans. En effet, le règlement REACh n’a pas réussi à éliminer de manière significative les substances les plus dangereuses pour l’environnement et la santé. En décembre 2021, l’ECHA a d’ailleurs reconnu que la majorité des produits vendus en ligne aujourd’hui ne respectent pas les exigences du règlement.

La nouvelle feuille de route de la Commission européenne concernant la réglementation des produits chimiques a été publiée le 25 avril dernier. Elle vise l’interdiction des familles de produits les plus toxiques d’ici à 2030. La modification majeure annoncée concerne le passage d’une évaluation des risques par substance à une évaluation des risques par famille. Concrètement, cette feuille de route prévoit, sans attendre la révision du règlement REACh, de rentrer dans une logique de restriction, voire d’interdiction de familles entières de substances chimiques connues pour leur dangerosité (retardateurs de flammes, bisphénols, composés perfluorés, phtalates…).

Cela devrait entraîner théoriquement une plus rapide diminution de l’exposition des populations à ces substances dangereuses, loin de la lenteur que pouvait impliquer l’approche substance par substance jusqu’alors en vigueur. Pour citer un exemple, l’interdiction des biberons au bisphénol A en 2010 avait simplement conduit à son remplacement par d’autres bisphénols tout aussi si ce n’est plus toxiques. De la même façon, les 2 premiers perfluorés interdits ont aussitôt été remplacés par d’autres, d’une même famille, constituée de plusieurs milliers de molécules.

L’association Générations Futures, notamment, s’est réjouie de cette nouvelle feuille de route, tout en mettant en garde contre l’introduction probable de dérogations selon le concept « d’utilisation essentielle ». Elle demande donc que les systèmes dérogatoires soient les plus fermés possibles en l’espèce, et limités dans le temps, afin que l’exception dérogatoire reste une exception.

Générations Futures insiste très justement sur le fait que la mise en œuvre effective de cette réglementation ne pourra pas avoir lieu sans le concours actif des Etats membres.

Notre Conseil régional est signataire de la charte des « Villes et Territoires sans Perturbateurs Endocriniens » lancée par le Réseau Environnement Santé et a notamment une ambition forte en vue d’une démarche zéro plastique et sans perturbateurs endocriniens dans les cantines des lycées.

Par ailleurs, des substances chimiques dangereuses sont stockées dans certains des entrepôts logistiques de la région classés SEVESO seuil haut ou seuil bas (sans parler des projets de nouveaux entrepôts), avec des risques pour la population et l’environnement. Cela pourrait être évité ou au moins réduit par des politiques alternatives, notamment en matière d’agriculture et d’aménagement du territoire.

En conséquence, le Conseil régional Centre-Val de Loire, réuni en session plénière le 12 mai 2022 à Orléans :

  • salue l’impulsion que vient de donner la Commission européenne avec sa nouvelle feuille de route concernant la réglementation des produits chimiques et notamment le passage à une évaluation par famille, tout en mettant en garde contre l’introduction de dérogations ;
  • appelle le gouvernement français à ne pas être une force de résistance contre cette réglementation mais au contraire à s’engager avec volontarisme dans cette action publique, notamment dans le cadre de la prochaine Stratégie Nationale Perturbateurs Endocriniens 2023-2026.